Le cheval est un animal domestique fragile, dans le sens où de toutes petites bêtes peuvent menacer sa santé. Et même le tuer. Il s’agit des parasites divers qui s’attaquent à lui, de manière plus ou moins sournoise. Les vers. De plus, notre équidé est très peu doué pour développer une immunité naturelle contre eux, contrairement à d’autres mammifères. Les traitements contre ces envahisseurs s’imposent donc. Tout le monde le sait…et tout le monde équestre s’exécute. Mais les parasites, eux sont plus doués pour la vie, et ce sont eux qui développent des résistances aux antiparasitaires.
Le tableau est sombre: le strongle commun endommage la paroi de l’artère mésentérique, les cyathostomes se logent dans la paroi du gros intestin, un organe majeur du système digestif du cheval, un cestode s’attache en marge de la valvule iléocaecale, un ascaridé atteint une taille problématique dans le petit intestin et un asticot s’accroche à la paroi de l’estomac pendant des mois. Chacun de ces parasites communs peut entraîner des problèmes de santé majeurs, en particulier des coliques, parfois suffisamment importants pour mettre la vie de l’hôte en péril.
Le professeur de parasitologie Alain Villeneuve de la Faculté de médecine vétérinaire de l’Université de Montréal expose dans un article/ http://www.medvet.umontreal.ca/servicediagnostic/parasitologie / son protocole de vermifugation. Il rappelle que plusieurs médicaments ont été développés depuis 20 à 40 ans. Toutefois, depuis plusieurs années, les rapports de résistance de parasites, en particulier Parascaris et les cyathostomes, apparaissent un peu partout. Ces nouveaux éléments nous amènent à nous questionner sur la validité des protocoles existants, écrit-il.
Il faut donc lutter contre la résistance. Ce phénomène prend de plus en plus d’ampleur, un peu partout à travers le monde, mais surtout dans des régions où l’on abuse des vermifuges. Le critère de sélection pour la résistance est l’utilisation du même médicament à répétition, chez les mêmes animaux. La résistance se manifeste dans tout le troupeau et est transmise de façon génétique.
Pour contrer cette résistance, un moyen efficace est l’analyse des matières fécales, et on le suggère de plus en plus, pour déterminer les animaux adultes résistants naturellement aux parasites. Plusieurs études ont montré que dans un troupeau normal, environ 50 à 80% des chevaux ont une charge parasitaire acceptable qui ne nécessite pas vraiment de traitement. Cette résistance semble génétique et demeure stable avec le temps. Analyser les crottins permettra de déterminer quels chevaux doivent être traités. L’avantage économique de cette approche a été montré et est assez important. Moins de vermifuge est utilisé et la pression de sélection pour le développement de résistance est aussi moindre, poursuit le professeur. Ne pas utiliser la coproscopie dans le programme de traitement d’un troupeau et traiter plutôt en aveugle nous expose à utiliser des médicaments non appropriés, à traiter inutilement des animaux non ou peu parasités, et favoriser l’apparition de résistance, ou encore pire, laisser un parasite dans un troupeau sans intervenir.
La rotation des vermifuges est souvent conseillée par les vétérinaires, afin d’empêcher le développement d’une résistance. Or, Alain Villeneuve a constaté que: « La rotation présente des difficultés majeures. Chez les jeunes animaux et en particulier chez ceux destinés à la compétition, il importe d’assurer une protection la meilleure possible contre les effets possiblement permanents de Strongylus vulgaris sur les artères. Les lactones macrocycliques sont les seuls médicaments à pouvoir donner cette protection. À l’automne, le traitement contre les gastérophiles ne peut se faire qu’avec une lactone macrocyclique. Par ailleurs, le traitement le plus efficace contre Parascaris semble impliquer les benzimidazoles. Ces mêmes benzimidazoles sont réputés être fréquemment la cible de résistance de la part des cyathostomes. Force nous est de conclure qu’au moins chez les chevaux de moins de 3 ans, la rotation des vermifuges ne peut se faire qu’aux dépens de la santé des animaux traités. »
L’affaire est compliquée, surtout qu’en Suisse les parcs sont suroccupés. De plus, rappelle Villeneveuve, un pâturage sain n’a pas été brouté l’année antérieure ou a été brouté par des chevaux vermifugés. Si un pâturage est contaminé, il faudra alors attendre au mois de juin pour que les larves infectieuses qui ont survécu à l’hiver soient mortes. En plein été, les larves peuvent survivre, en conditions idéales, jusqu’à 6 semaines. De même, il importe que l’herbe soit suffisamment abondante sur le pâturage. Les chevaux vont alors réserver une partie du pâturage pour y déféquer; si l’herbe vient à se faire rare, ceux-ci devront se résoudre à paître dans ces zones fortement contaminées. Si une herse est utilisée pour uniformiser le fumier sur un pâturage, il faut transférer les animaux ailleurs pour une période de 6 semaines.
Conclusion: la rotation des vermifuges est une bonne solution, insuffisante toutefois. L’analyse des crottins s’impose périodiquement.
Catégories :Vétérinaire
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